Préface

 

             Voilà bien des années que Philippe Bourgois et Nicole Métivier tissent de concert des ouvrages où s’entrelacent harmonieusement poésie et illustrations. Leur complicité créatrice s’est dévoilée de plus en plus au fil des recueils.  Sur la première de couverture de la dernière publication « Photos-strophes en fantaisie », le discret illustrateur des premières éditions est apparu aux côtés de son amie poète ; ainsi étaient révélés aux lecteurs les liens de plus en plus étroits qui les unissent sur le plan artistique. 

 

             A force de cheminer ensemble, nul doute que chacun s’est ouvert toujours davantage au regard de l’autre et à son mode d’expression, nul doute que chacun s’est imprégné de la sensibilité de l’autre au point de parvenir parfois à une réelle osmose. Illustrateur de la poésie de Nicole Métivier, Philippe Bourgois s’est senti peu à peu une âme de poète.  Tant de souvenirs dormaient en lui, tant d’émotions du passé tentaient de naître en mots, il suffisait d’une étincelle amie pour l’aider à se réaliser. Aux côtés de Nicole et sous sa guidance, Philippe s’est surpris au jeu de l’écriture. Il a rencontré les mots, le plaisir de les assembler, leur pouvoir de suggestion.  Il s’est confronté à l’exigence de la métrique, a mesuré que les contraintes obligent à concentrer ses idées et il a ressenti le délicieux vertige que suscite la musicalité des alexandrins. Il a vécu l’apaisement de coucher sur du papier sa propre expérience de vie.

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             Ainsi est né « Souvenance », dans une communion des cœurs et des talents entre deux artistes.  Et c’est un véritable bijou. Le lecteur est entraîné dans un monde vibrant d’émotions. Il est invité à voyager dans le temps et dans l’espace, découvrant des moments forts de la vie de Philippe Bourgois, depuis sa naissance en Algérie jusqu’au rapatriement dans l’hexagone. La prose côtoie les vers, certaines tranches de vie sont présentées dans les deux formes, faisant éclater la spécificité de chaque mode d’écriture. Fi des visions puristes qui s’attarderaient sur quelques règles de prosodie non respectées. La justesse des mots donne à sentir et rend palpable les sentiments les plus profonds. La musique des vers coule en parfaite harmonie.

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            « Souvenance » nous offre le regard de Philippe Bourgois sur l’Algérie. Il rend un émouvant hommage à cette terre chère à son cœur. Les textes exhalent l’ambiance méditerranéenne, ses couleurs, sa lumière, ses parfums, ses sons, ses saveurs. Le lecteur sent couler le jus frais de la tomate sous ses doigts et dans sa gorge. Il respire les parfums de la mandarine, des nèfles, de la menthe et du jasmin. Il découvre le goût de la mouna, du svenj et du créponné. Il entend l’effervescence du marché. Il s’enivre de la beauté des paysages naturels et des villes. Il ressent tout autant la caresse du soleil et de la mer que la crainte du simoun. Nous connaissions le talent de l’illustrateur. Les écrits à quatre mains de « Souvenance » produisent des images aussi nettes et puissantes que celles du photographe.

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            « Souvenance » recrée et fait revivre l’Algérie à l’heure de l’enfance de Philippe Bourgois. Chaque page campe l’enfant qu’il fut et relate son expérience unique. L’enfant qui jouait avec les kabyles, loin de toute considération politique et autre qui échappent heureusement à la perception de jeunes humains portés seulement par les vraies valeurs du partage. L’enfant qui a admiré certains de ses professeurs et s’est construit sous leur regard. L’enfant qui a reçu à jamais la terrible empreinte des dimanches soir, symboles de la séparation d’avec ses grands-parents et du retour vers la pension. L’enfant qui a été confronté à la violence des grands. L’enfant qui a été plongé bien malgré lui dans les horreurs de la guerre et dont l’histoire personnelle a payé un lourd tribut à l’Histoire collective. L’enfant surtout qui a grandi en terre d’Algérie où il a connu aussi tant de joies simples qui font le vrai bonheur. Cette terre d’Algérie qui demeure son berceau, Philippe Bourgois la porte en lui, en filigrane de son être, dans une aura d’amour qui transpire à chaque phrase, à chaque vers. C’est une terre de paix que « Souvenance » nous décrit et qui est restée gravée en Philippe Bourgois, au-delà des aspects négatifs que d’aucuns auraient pu privilégier.

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             Ce témoignage de vie aura certes d’autant plus de résonnance dans le cœur de ceux qui connaissent personnellement Philippe Bourgois, ainsi que dans la mémoire de ceux qui ont vécu cette période de l’Histoire et des expériences similaires. Il touchera et éclairera les jeunes générations ainsi que tous ceux qui ont suivi de plus loin ces événements, sans les vivre de l’intérieur. Il suscitera l’envie de se rendre en Algérie. Mais Souvenance est bien plus qu’un ouvrage autobiographique faisant revivre « un passé-souvenir » ; il dépasse la simple vocation à offrir des souvenirs à un cercle familial et à des proches. C’est un recueil qui fait vibrer l’âme humaine, une ode à la vie célébrée dans l’intensité des sensations et des ressentis, amenant parfois au coin des lèvres la saveur salée des larmes qu’il soulève par sa force évocatrice. S’il fallait lui donner un unique qualificatif, je choisirai l’adjectif « authentique ».

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            Bon voyage dans ce recueil de poésie à quatre mains, exultant de vraie vie et de véritable amitié.                                    

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                                                                                                                          Sylvie WEISSE,

                                                                                                                           amie en poésie.